André Grimaldi est professeur d’Endocrinologie à la Pitié Salpêtrière, ancien chef du service de diabétologie.
Il a publié L’Hôpital malade de la rentabilité en 2009 et il est coauteur du Manifeste pour une santé égalitaire et solidaire (2011).
Le Pr André Grimaldi est aussi l'un des fers de lance du Mouvement de Défense de l'Hôpital Public (MDHP) qui a rassemblé médecins et professionnels de la santé contre la loi HPST (Hôpital, Patients, Santé, Territoires), dernière grande réforme de l'hôpital en 2009.
Bref, le professeur Grimaldi sait de quoi il parle quand il parle de l'Hôpital et de ses dérives. Dans son dernier ouvrage : LA SANTÉ ÉCARTELÉE, Entre santé publique et business, on découvre sans grand étonnement ce qu'il pense de la nomination en 2012 du maire de La Garenne-Colombes à la chefferie des urgences de l'hôpital Georges Pompidou ... Lisez plutôt !
Extrait :
Dernière affaire relevant des rapports rétrogrades entre l’Élysée et l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris : l’affaire Juvin.
Le Professeur Philippe Juvin est maire de la Garenne-Colombes, député européen, secrétaire national et membre du Bureau Politique de l’UMP. Il était conseiller Santé du Président Sarkozy.
Dans la mesure où les urgences de l’hôpital Beaujon étaient menacées de fermeture, il se fit nommer dans le service d’urgences de l’hôpital européen Georges Pompidou (HEGP) dirigé depuis 1999 par un praticien hospitalier à quelques mois de la retraite. Mais cette retraite était prévue pour décembre 2012, soit après les élections présidentielles de juin.
Philippe Juvin craignait qu’en cas de défaite du Président Sarkozy, la communauté hospitalière de l’HEGP lui préférât un vrai chef de service travaillant à plein-temps. Il brusqua la marche des événements en trouvant une astuce administrative. On décida de rattacher une structure sociale de l’hôpital Corentin-Celton au service des urgences de l’hôpital Pompidou. Qui dit changement de service, dit nouveau service, et qui dit nouveau service, dit élection d’un nouveau chef de service. Le tour était joué ! C’est ainsi, qu’avec l’accord peu glorieux de la communauté médicale de l’hôpital Pompidou, la directrice, « seule patron à l’hôpital », nomma Philippe Juvin chef de service.
Aucune personne raisonnable ne pouvait penser que le Pr Philippe Juvin exercerait son activité à plein-temps.
Encore une fois, la loi de la République, pourtant explicite, est violée. Un député ne peut pas être fonctionnaire d’État, à part les professeurs d’universités qui jouissent d’une liberté académique. Or les PU-PH de médecine et a fortiori les chefs de service, ne sont pas seulement universitaires, ils sont aussi praticiens hospitaliers, et à ce titre fonctionnaires.
Lors d’un débat entre Philippe Juvin et moi-même organisé par Le Nouvel Observateur à Strasbourg dans le cadre de la campagne présidentielle, un participant fit remarquer qu’il était important qu’il y ait des professionnels au Palais Bourbon. Remarque parfaitement juste. Il suffit alors au dit professionnel de se mettre en disponibilité ou d’accepter un mi-temps pendant la durée de son mandat électif.
Philippe Juvin crut bon, lors de ce débat, de faire la critique de « l’égoïsme patrimonial des chefs de service » qui défendent leurs structures, et s’opposent à des regroupements.
Je lui fis seulement remarquer qu’il était le seul à ne pas pouvoir critiquer les chefs de service. Quand on n’est pas sur le terrain, à la tête de son équipe, en train de donner l’exemple, on manque de crédibilité pour critiquer les autres. Il faudrait donc qu’à l’avenir il soit clairement établi qu’un député national ou européen, ou un maire de grande ville, ne peut pas en même temps être chef de pôle ou chef de service dans les hôpitaux publics, de même qu’il ne peut pas cumuler ses salaires et ses multiples indemnités.
Tant que la communauté médicale de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris ne sera pas capable de dire collectivement non aux abus de pouvoirs des politiques d’où qu’ils viennent, elle n’existera pas comme communauté et restera un rassemblement d’individualités. Le nouveau président de la CME de l’AP-HP fit preuve dans cette affaire d’une résignation désabusée : « Ce n’est pas la première fois, cela ne sera pas la dernière ! »
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